#Mali : Préférence parentale pour un enfant : Entre passion et devoir

Afficher une préférence pour un enfant au détriment du reste de la progéniture peut déboucher sur la perte de confiance en soi chez les autres. Un sociologue et un psychologue que nous avons interrogés évoquent des raisons d’ordre culturel. L’islam n’approuve tout simplement cette pratique

Publié dimanche 03 novembre 2024 à 20:31
#Mali : Préférence parentale pour un enfant : Entre passion et devoir

 Les parents doivent avoir le même degré d’affection pour tous les enfants

 

Sur la question, les puritains n’auront aucune difficulté à conclure à une dépravation des mœurs et à une inversion de la hiérarchie des valeurs. Pour eux, il est inconcevable, en tout cas dans la conception de notre société traditionnelle, d’afficher une préférence pour l’un de ses enfants au détriment des autres. Nos gamins doivent être traités sur le même pied. Malheureusement, la tendance actuelle laisse entrevoir autre chose, notamment un penchant de la part de certains parents à couver un enfant parmi les siens et à lui passer ses caprices.

 Certains n’hésitent même pas à dire que le phénomène est plus accentué dans les familles monoparentales (c’est-à-dire un veuf qui vit seul avec ses enfants ou une veuve qui se retrouve seule avec sa progéniture) ou chez les couples qui ont mis du temps à goûter au bonheur d’être parents. La véracité de cette affirmation n’est pas établie, mais une chose est sûre, certains développent ad nauseam cette faiblesse d’afficher une préférence excessive pour un enfant au grand dam des autres.

Les spécialistes des questions de société expliquent tout le risque que cela comporte sur l’éducation de l’enfant en question. Pour eux, cette attitude peut déconstruire sa personnalité, l’amener à douter de ses potentialités et à tout attendre de papa ou maman. Il y a aussi le risque de voir les autres le jalouser et ne plus le porter en estime. Ces exemples sont légion dans notre société qui vacille, admettons-le, sur ses fondamentaux.

Les sociologues conseillent aux parents d’avoir la même exigence pour tous les enfants dans l’éducation, le même degré d’affection pour eux. Analyses croisées des citoyens sur la question. Hamidou Kebé affiche une mine déconfite à l’évocation de la question. Ce jeune étudiant de 22 ans est l’aîné d’une fratrie de trois frères dont une fille. Il explique garder encore à l’esprit cet épisode de son enfance où ses parents manifestaient un amour excessif pour son jeune cadet, aujourd’hui âgé de 18 ans.

Il en a souffert surtout que ses géniteurs, selon lui, croyaient à une intelligence supérieure de son frère qui avait fini par croire qu’il était humainement le plus important de toute la fratrie. Mariam Coulibaly, fraîchement mariée, a aussi vécu la même situation dans sa famille. Sa sœur aînée d’une fratrie de quatre filles était traitée par leurs parents avec la plus grande complaisance. Elle et ses sœurs avalaient constamment des couleuvres parce que la «reine de la maison» avait un caractère grincheux.

DES RAISONS CULTURELLES- La vieille mère Assitan Coulibaly ne passe pas par quatre chemins pour justifier le phénomène. Pour elle, c’est normal d’avoir une affection excessive pour un enfant qui obéit aux parents et respecte les valeurs familiales. «Je sais qu’il y a d’autres raisons qui peuvent prévaloir dans la préférence d’un enfant. Mais ce seul critère est suffisant pour expliquer l’attitude des parents qui affichent ostentatoirement leur affection pour un enfant au détriment du reste de la progéniture», explique la mère de famille. Oumar Diakité accepte aussi de verser son avis dans le débat. Ce père de trois enfants dont deux garçons estime simplement que c’est un sentiment naturel qui ne s’explique pas. En tout cas qui échappe à la raison. «Cela peut être lié au sexe. Certains parents adorent avoir un garçon, d’autres une fille», explique-t-il.

Pour Fodié Tandjigora, sociologue, la préférence d’un enfant au détriment des autres est bien une triste réalité dans notre société. Nos aïeuls s’évertuaient à ne laisser transparaitre, aussi bien émotionnellement que dans les actes, une quelconque affection de plus pour un enfant au détriment des autres. Il précisera que malheureusement, le phénomène contraire se passe au vu et au su de tout le monde surtout quand l’enfant travaille bien à l’école. On lui offre plus de présents. Il est plus chouchouté. À en croire le sociologue, cela est lié au fait que tout le monde a compris que c’est l’école qui démocratise la réussite donc un enfant qui travaille bien dans sa scolarité est pris en estime par les parents.

Il essaie de trouver une explication à cette attitude des parents et pense qu’ils font cela pour encourager les autres enfants à bien travailler aussi à l’école. Il suggère surtout d’accompagner chaque enfant dans son projet depuis sa tendre enfance pour renforcer son estime de soi. Et de révéler qu’on peut toujours préférer un enfant par rapport à un autre, mais sans laisser transparaitre ce sentiment parce que cette attitude peut porter préjudice aux autres. Donc, maitriser ses émotions et aider chaque enfant à développer son potentiel est un impératif, selon le sociologue.

Un autre spécialiste évoque des raisons d’ordre culturel. Il s’agit de Dr Dramane Elhadji Touré, psychologue au département de psychologie à la Faculté des sciences humaines et des sciences de l’éducation (FSHSE). Il explique que certains parents aiment des enfants de sexe masculin pour des raisons culturelles et psychologiques. Selon lui, l’argumentaire développé par ces parents est que le garçon perpétue simplement le nom de famille.

Des grands-parents ou arrière-grands-parents avaient une philosophie toute faite sur la question. Pour eux, le garçon représente un futur bras valide pour des travaux champêtres. Le psychologue trouve naturel d’aimer un enfant plus qu’un autre. Mais sauf qu’il ne faut pas, selon Dr Touré, l’étaler au grand jour pour éviter d’affecter le reste de la progéniture. Le psychologue affirme lui aussi que les parents préfèrent généralement les enfants obéissants et respectueux des valeurs familiales comme la perfection continue de la conduite, le respect dû aux aînés et parents, mais aussi le sens de la responsabilité, de la solidarité et du partage. Et de préciser surtout que chaque enfant a besoin de l’affection de ses parents sans laquelle son développement psychologique n’est pas possible.

Le professeur à la FSHSE souligne que les conséquences de cette situation peuvent être énormes, notamment à court terme. L’enfant peut estimer être l’objet de rejet de ses géniteurs. À moyen terme, cela aura tendance à modifier son comportement parce qu’il sera plus enclin  à se renfermer sur lui-même. À long terme, il ruera dans les brancards pour un oui ou un non parce qu’ayant perdu la confiance en soi. Sans tomber dans l’argumentation facile, Dr Dramane Elhadji Touré ajoute que très souvent les parents préfèrent le dernier enfant «le benjamin» qui symbolise à leurs yeux la fin du cycle de la maternité. Plus de justice et d’équité sont requises de tout parent dans l’éducation de sa progéniture.

Le vieux prêcheur à Kalaban-coura, Amadou Doumbia, lui emboîte le pas. L’homme de foi évoque aussi le point de vue de l’islam qui interdit, selon lui, de montrer plus de préférence pour un enfant au détriment de ses autres fils et filles. Aujourd’hui, les positions sont nettement tranchées sur la question. Mais tous doivent comprendre qu’avoir un enfant est une grande responsabilité, mais requiert aussi une implication personnelle pour réussir son éducation.

Amsatou Oumou TRAORE

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