
Le réseau routier national subit de graves dommages causés par des véhicules gros porteurs hors gabarit et surchargés de marchandises, principalement en provenance des ports maritimes où transitent les importations et exportations du pays. Cette surcharge entraîne une dégradation précoce des infrastructures routières, conçues pour supporter des poids réglementés : trois essieux pour le tracteur et trois à quatre essieux pour la semi-remorque.
Face à ce constat alarmant, le ministre des Transports et des Infrastructures a, dans un communiqué du 5 février dernier, exhorté les propriétaires de véhicules lourds de transport de marchandises à respecter strictement les normes relatives aux gabarits, aux poids et à la charge à l’essieu. Cette mise en garde s’inscrit dans le cadre de l’application intégrale de l’article 32 du décret n°2023-0509/PT-RM du 12 septembre 2023, qui régit l'usage des voies ouvertes à la circulation publique et de la mise en circulation des véhicules.
Dans ce décryptage, le directeur général des Transports, que notre équipe a rencontré à son bureau, explique, entre autres, l’esprit de cette mesure relative au respect des normes relatives aux gabarits, aux poids et la charge à l’essieu des véhicules. Il donne des informations précises sur le processus d’application, le tonnage et les dimensions maximales autorisées pour chaque type de véhicule.
«Notre pays est préoccupé par la préservation de son patrimoine routier. Chaque année, l'État investit des milliards de Fcfa dans la construction et l'entretien des routes. Le Fonds d'entretien routier récupère les recettes des péages et la redevance d’usage sur les produits pétroliers, mais ces ressources ne suffisent pas à maintenir en bon état un réseau routier dont certaines infrastructures ont plus de 20 ans. Ces routes doivent garantir un service sûr et conforme aux exigences des usagers», détaille Mamadou Sow.
Selon lui, l'objectif de cette mesure est d'empêcher la dégradation prématurée de nos routes et des ouvrages de franchissement. Ainsi, les dimensions maximales autorisées sont de 16,5 m de longueur pour les véhicules articulés, 2,55 m de largeur pour l'ensemble des véhicules et 4 m hauteur pour tous véhicules confondus. À partir du 1er avril 2025, tout transporteur ne respectant pas les dimensions réglementaires s'exposera aux sanctions prévues par la réglementation en vigueur. Celles-ci incluent notamment l'immobilisation du véhicule à la frontière ou aux points de contrôle, ainsi que l'obligation de transbordement et de correction du gabarit, le cas échéant.
De l’analyse du patron des transports, une chose est de pouvoir ravitailler la population, l'autre est de ne pas dilapider les ressources mises à la disposition du ministère en charge des Transports pour la construction des routes afin d'offrir des routes en bon état aux usagers. «Le code de la route définit ces normes et impose des limites strictes sur le gabarit des véhicules. Lorsqu'un camion de 20 à 22 tonnes circule sur une route conçue pour supporter 13 tonnes à l'essieu, après seulement trois passages, la structure de la zone est affaiblie. La première pluie suffit alors à créer des trous, communément appelés nids de poule», explique-t-il.
INTERDIRE LES VEHICULES HORS NORMES- Selon le spécialiste, chaque type de véhicule dispose d’un tonnage maximal autorisé. «C’est 18 tonnes maximum pour un véhicule isolé (camion) avec deux essieux, et 26 tonnes pour un véhicule de trois essieux. C’est un maximum 80 tonnes pour les véhicules articulés avec plusieurs essieux, un train double articulation neuf essieux conteneurs. Ces véhicules ne sont pas chez nous. Le plus souvent, c'est dans les transports exceptionnels. Et pour un véhicule pour le transport normal, le maximum autorisé est de 56 tonnes tous poids compris», explique le directeur général des Transports. En ce qui concerne les véhicules de transport des marchandises solides, liquides, de gaz butane, de personnes et les tricycles, les poids sont édictés par les textes en vigueur au Mali.
Mamadou Sow insiste sur le fait qu’aucun véhicule ne doit dépasser la charge limite inscrite sur sa carte grise, conformément à la réglementation internationale. «Il est temps que nous prenions soin de nos investissements. Trop souvent, une route commence à se dégrader avant même son inauguration. Si nous ne respectons pas les normes, nous continuerons de voir nos infrastructures se détériorer prématurément», souligne-t-il. Et de déplorer qu’un véhicule a été contrôlé au poste de péage de Ouéssébougou avec 36 tonnes à l'essieu, en dépassant le maximum autorisé qui est 13 tonnes. Tous les véhicules qui utilisent le réseau routier national malien sont concernés par cette mesure.
Mamadou Sow, directeur général des transports
Selon le directeur des Transports, la ministre chargée des Transports, Mme Dembélé Madina Sissoko, a saisi ses homologues des pays de transit par l'intermédiaire du ministre des Affaires étrangères et de la Coopération internationale, afin de les informer officiellement de cette mesure. Et des instructions fermes ont été transmises aux directeurs des entrepôts dans les ports de transit pour notifier aux transporteurs des pays voisins que, dès le 1er avril, le Mali interdira la circulation des véhicules hors normes et hors gabarits. «Tous les ministres et directeurs des transports des pays de l'AES sont informés de cette décision», assure Mamadou Sow.
Les amendes sont définies par le code de la route, le code pénal et d'autres textes réglementaires. Toutefois, cette mesure ne prévoit pas de sanctions pécuniaires directes ou indirectes, ni d'emprisonnement. «Les routes sont construites par l'État et l'État va interdire les véhicules hors normes de circuler sur ses routes. Ceux qui veulent continuer d’exploiter le réseau routier malien seront obligés de se conformer aux normes et gabarits fixés par le code de la route», renchérit le directeur des Transports.
S’agissant du processus d’application, Mamadou Sow indique que le contrôle du respect des nouvelles régulations sera assuré par les services publics compétents, déployés aux péages, aux postes de contrôle, aux frontières et dans les entrepôts maliens des ports de transit. «L’État s'est donné les moyens nécessaires pour garantir l'application et le suivi de ces mesures», assure-t-il. Et d’insister sur l'urgence d'agir face à la dégradation rapide des routes sous l'effet des poids lourds : «Ce problème est principalement causé par une minorité de propriétaires de véhicules qui ne sont pas des transporteurs professionnels. Ils représentent seulement 0,3 % du secteur, mais leur comportement impacte tout le réseau routier.»
Babba COULIBALY
La surcharge accélère l’usure des véhicules, réduisant ainsi leur durée de vie et augmentant les frais d’entretien. L’État a pris des mesures pour non seulement préserver le réseau routier, mais aussi garantir des conditions de travail durables aux transporteurs et chargeurs.
En plus de la dégradation précoce du réseau routier national, la circulation des gros porteurs hors normes et gabarits entraine d’autres désagréments en milieu urbain comme les accidents. Par peur, les usagers évitent très souvent de dépasser ces véhicules surchargés..
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