
Il
y a notre histoire aussi, celle fondée sur la mémoire du contact de nos
sociétés avec les Arabes en général et de l’islam en particulier ; qu’il
s’agisse du Mandé, du Songhoy, du Massina, du Ouassoulou samorien, du Khasso et
des toucouleurs d’El Hadj Omar Tall. Cette relation est bien documentée avec
une série de pèlerinages à La Mecque qui ne laissent aucun doute :
Baramandana, Sakoura et Kankou Moussa, pour le Mandé, Askia Mohamed pour le
Songhoy et El Hadj Omar dont personne ne conteste l’érudition.
Aujourd’hui, on parle de Iyad Ag Ghali et Amadou Kouffa, deux boulets de canon de l’artillerie internationale du radicalisme, sous des noms divers, qu’on les appelle «AlQaida au Maghreb islamique», «Ansardine», «Katiba Macina», ou «Groupe de soutien à l’islam et aux musulmans»… Ils ne sont que les continuateurs d’une face tragique de notre vécu collectif ; car tous les agresseurs ont fini par se dissoudre au sein de la population dont la résilience apparaît comme une arme de négociation massive de la paix.
LA
CHUTE DE L’EMPIRE DU GHANA- Cet empire, fondé par les soninkés, a tenu sept
siècles. Il a été mis à sac par les cavaliers de l’islam, les «al-Murābiṭūn» ou
«almoravides» au XIème siècle dans un contexte qui était caractérisé aussi par
une grande sècheresse. El Békri (1067) qui a séjourné à Koumbi Saleh, rapporte
que la ville comptait douze mosquées en même temps que les bois et bosquets
sacrés qui abritaient les idoles. Jean Jolly (1996) reviendra sur les mêmes
faits. (Histoire du continent africain : De la préhistoire à 1600,
L’Harmattan, 1996)
Beaucoup
de mythes fondateurs de plusieurs villes prennent ici leur source. La
prospérité du Ghana, nous enseigne l’histoire, tenait au fait qu’annuellement,
il fallait sacrifier au python protecteur une des plus jeunes filles du pays.
Ce pacte longtemps et régulièrement renouvelé va être remis en cause quand vint
le tour de Sya d’être sacrifiée. Yattabaré, son fiancé, a tué le serpent, geste
qui serait, selon la tradition orale encore chantée, à la base de la décadence
et de la dispersion des «marakas» ! Ce mythe vient comme une forme de
catharsis, mais en réalité le coup fatidique contre le Ghana vint des
envahisseurs fanatiques, pour la plupart étrangers, ne parlant aucune langue du
pays.
Dans
les faits, les «al-Murābiṭūn» ne vont pas tarder à construire la première
théocratie au nom de l’islam en Afrique. Pour les territoires situés plus au
sud, l’incrustation des «fanatiques» berbères va contribuer à l’émergence de
nouvelles entités dont la plus achevée sera l’empire du Mandé. Cette partie de
l’Afrique de l’Ouest était déjà au contact de l’islam depuis le IXème siècle,
au moins. Ce qui n’empêcha pas la folie destructrice des «al-murabitun». Bien
organisés, selon une discipline rigide, vivant en communauté pour ne pas «se
perdre», les «al-murabitun» étaient, à tous les points de vue, des soldats bien
formés. La base de leur enseignement religieux s’appuyait sur la tradition
issue de l’imam Malik. Les cas de déviance étaient sanctionnés par des coups de
fouets qu’il fallait supporter dans «un esprit de pénitence» et tous étaient
aux ordres du maître Ibn Yassin, le gardien de la foi.
Vincent
Lagardère, dans «Esquisse de l’organisation militaire des murâbitûn à l’époque
de Yûsuf B. Tâsfln» (Revue des mondes musulmans et de la Méditerranée Année
1979 27 pp. 99-114) rapporte que ce sont «30.000 guerriers montés sur des
chameaux de selle» qui ont attaqué la ville de Sigilmàssa. Ils renforceront la
mobilité des troupes avec l’introduction des chevaux dont le rôle sera
déterminant dans la progression des troupes, surtout en direction du sud.
Désormais, on parle d’un «art équestre» avec une éducation spécialisée
consignée dans des manuels spécifiques comme le «traité de Furùsiya d’Ali b.
Hudayl al-Andalusi». «Le cavalier était équipé d’une épée, d’un bouclier en
peau de lamantin.»
L’islam
dont se réclament ces nouveaux défenseurs de la foi, est de type rigoriste,
très austère. Ils ont une «idéologie de la guerre sainte» au nom de laquelle
leur chef de tribu Yahya va les lancer contre les populations noires et dans le
contrôle des routes caravanières. Ils parlent au nom du «djihad» pour dans un
premier temps diffuser l’islam, en l’imposant par la force au besoin, et
ensuite de lutter contre les puissances hostiles à l’islam.
On
retiendra surtout dans cette incursion sanglante, qu’à la base se trouve
l’introduction d’éléments nouveaux dans la mobilité des troupes, à savoir le
chameau et le cheval. Quelques siècles après, le même élément stratégique sera
mis à profit avec, cette fois l’introduction des véhicules tout terrain et des
motocyclettes, toujours avec l’appui d’envahisseurs étrangers.Tatiana Pignon,
(spécialiste de l’histoire de l’islam médiéval) dans sa publication «Les Almoravides,
l’Andalûs et l’Afrique musulmane (1042-1147)» donne des orientations solides
sur la motivation de ce mouvement : «Poussés par leur désir de propager
l’islam, et favorisés par leurs talents guerriers, les Almoravides vont y
parvenir en se réappropriant le modèle du jihâd ; c’est d’ailleurs de la même
manière que procède Saladin, plus à l’est, pour construire un puissant empire.
Le
jihad prend deux formes principales : il s’agit, d’une part, de diffuser
l’islam, quitte à l’imposer par la force après conquête de territoires
étrangers ; il s’agit ensuite de lutter contre les puissances étrangères
hostiles à l’islam, incarnées notamment par les rois catholiques d’Espagne. Le
premier jihâd almoravide, on l’a dit, s’oriente vers l’Afrique noire, et plus
précisément le pays de Ghana qui est conquis à partir de 1054.» (Les clés du
Moyen Orient, 27/02/2020).
L’espace
géographique qui correspond presque au Mali de nos jours est entré en contact
avec l’islam de façon pacifique, essentiellement par le commerce. Cette époque
est largement documentée aussi bien dans la tradition orale que par les récits
des géographes arabes qui ont visité le «bilad es soudan», le pays des noirs.
Entre le dixième et le onzième siècle, les messagers de l’islam qui ont franchi
les portes du Sahara l’ont fait à travers le commerce caravanier et la
tolérance.
Il en a été ainsi aussi bien pour le Mandé que pour le Songhoy, avec d’abord des conversions des rois et celles des peuples ensuite. Dans le cas du Mandé, la foi était si établie qu’elle avait ses porteurs attitrés, les «marabouts du mandé», les «mandé mori» dont les patronymes sont Cissé, Touré, Diané et Bérété.
Les
premiers messagers de l’islam n’ont pas trouvé une terre vierge de
civilisation, bien au contraire. Le Mandé avait déjà opéré son unité
territoriale à partir d’une Constitution devenue célèbre depuis le 13ème
siècle, «la Charte du Mandé» ou la «Charte de Kouroukanfoukan».
El
Békry (1010-1094) et Ibn Batouta (1304-1368) qui ont parcouru le pays, en ont
eu la preuve ; ils ont même été subjugués. Ibn Batouta qui a visité le pays
rapporte le degré de sécurité qui y régnait au point qu’il n’a eu besoin que de
seulement trois porteurs pour son voyage. Il y a constaté l’absence totale
d’injustice. Il a surtout vu des hommes et des femmes qui respectent les
prescriptions de l’islam au point que la prière du vendredi est célébrée avec
attention : de beaux habits, la mosquée vite remplie… Il n’y a pas de vol et
enfin, il a noté le «zèle à apprendre par cœur le Saint Coran» (Voyage, tome 3,
Paris, La Découverte, 1982, p. 426). ! On peut donc dire que le message de
l’islam est venu conforter un socle solide.
En
1050, rapporte El Békry, le premier roi du Mandé, en la personne de Mansa
Baramandana s’est rendu à La Mecque pour le pèlerinage. Il sera suivi deux
siècles plus tard par Mansa Sakoura et le phénoménal Mansa Kankou Moussa. La
«route de La Mecque» était connue et bien maîtrisée. Elle partait de
l’intérieur de l’Afrique de l’Ouest, du Fouta Toro, de la vallée du Sénégal en
direction du Maroc, à travers de grandes étapes comme Taza, Fez, Tafilelt,
Touat.
Certains pèlerins, ceux des abords nigériens, se joignaient aux caravanes, après avoir séjourné à Ségou ou Tombouctou avec le cap sur la ville de Touat. De là, la ligne atteignait Tripoli et le Caire avant de traverser la mer pour l’Arabie. Le chemin du retour était tout aussi connu.
En route pour Gao, Ibn Batouta témoigne qu’il a rencontré «Des groupes de musulmans blancs : des kharidjites de la branche ibadite (celle des Mozabites), appelés localement Saganogo, et des sunnites de rites malékite (courant en Afrique du Nord), appelés Touré - ces deux noms sont encore portés par des clans mandingues.» (Candide en Afrique ou le voyage d’Ibn Batouta, Pierre Alexandre dans «mensuel 62», décembre 1983).
L’ISLAM
PACIFIQUE- Guy Lasserre a traité de «L’islam noir» (Les cahiers d’outremer,
1952, pp. 178-181). Il y fait la synthèse de «Contribution à l’étude de l’Islam
noir», (Mémorandum II du Centre IFAN Cameroun, 1949, 120 pages) du capitaine
Cardaire, chargé des Affaires musulmanes auprès du gouverneur de la colonie du
Soudan. Cardaire a analysé les causes de l’unité islamique.
Il a surtout étudié les causes de l’emprise de
l’islam en milieu animiste du Soudan à travers les directions et les forces des
courants religieux qui ont pris d’assaut les pays de l’intérieur. Dans son
analyse, Cardaire retient «deux courants d’invasion de l’islam». Le premier
courant, retient-il, est venu de l’Ouest ; il le qualifie de «courant kamitique
peul ou foulbé» dont la source de la doctrine part du Maghreb et en particulier
dans l’enseignement almoravide, modifié par la culture des races qui le
véhiculèrent : Peuhl ou Poullos, Toucouleurs, Mandé, Haoussa».
«Cet
Islam, commente-t-il, a été entaché dès ses origines de traces d’idolâtrie,
subit des déformations rendues fatales par la mentalité des croyants eux-mêmes
et surtout fut privé de soutiens extérieurs et de contact avec les sources
pures de l’Islam». «Le culte idolâtre des Marabouts, l’amour des «gris-gris»
disent éloquemment que, privés des lieux saints et de la langue arabe, Foulbé
et Toucouleurs s’acheminaient lentement vers une nouvelle idolâtrie»,
termine-t-il.
Le
deuxième courant identifié par Cardaire est venu de l’Est, de l’égypte et s’étendait
au Soudan oriental et au Tchad. Pour lui, c’est le «courant négro-arabe». «Si
le courant Foulbé ne s’est pas prolongé plus loin vers l’Est, c’est que depuis
qu’il avait pénétré au Nigeria du Nord au début du seizième siècle, il était
entré au contact du second grand courant islamique», décrit-il. «L’Islam
qu’avaient répandu jusqu’au Logone les Arabes plus ou moins négrifiés, au long
des âpres pistes de Libye et du Borkou, était imprégné de l’esprit des
confréries politico-religieuses et gardait avec l’Arabie d’étroites relations».
«Tandis que le courant Kamitique-Peuhl participait peu à la vie religieuse de
l’Islam et que l’islamisation des masses restait médiocre, le courant
négro-arable était sans cesse vivifié par les nouvelles du Caire et de la Mecque»,
compare-t-il.
Le XIXème siècle a été particulièrement violent pour le Soudan. Il correspond à la chute de deux grandes constructions politico-religieuses : la théocratie du Massina (1828-1862) et la théocratie toucouleur d’El Hadji Omar Tall. Samori aussi a entrepris de tailler son empire sous le sceau de l’islam, on ne le dit pas assez souvent. Samori était un imam. Ce siècle correspond également à la conquête coloniale qui a littéralement mis fin aux différentes ambitions surtout à partir de 1857, année où Faidherbe a pu venir à bout du siège de Médine, privant El Hadj Omar d’une victoire certaines à Médine, la capitale du roi Diouka Samabala Diallo du Khasso, un pays déjà musulman.
Correspondance particulière
Pr Ibrahim Maïga
Rédaction Lessor
Les agents qui ne se sont pas présentés lors des opérations d'identification biométrique ont un délai de grâce de trois mois, allant du 8 septembre au 8 décembre 2025 pour régulariser leur situation administrative.
De son vrai nom, Alpha Diallo, le rappeur Franco-guinéen, connu sous le nom d'artiste « Black M », en séjour en Côte d'Ivoire et se trouvant dans une situation de conduite imprudente, a été interpellé..
Nouvelle incroyable au Brésil concernant Neymar Jr. En effet, le footballeur a été désigné hériter d'un milliardaire en dollars autre que son père. Le testament a été rédigé à son nom..
Une habitante de la ville de Goundam a vu sa maison effondrer suite aux multiples érosions et intempéries survenues au cours de la saison d’hivernage..
Après avoir passé trois nuits dans le noir, certaines familles des logements sociaux de Kayes et ses alentours ont enfin poussé un ouf de soulagement suite au rétablissement de l’électricité dans leur secteur. Rappelons que certaines concessions de la cité ATT Bougou (logements sociaux) et .
La salle de conférence du gouvernorat de Mopti a abrité du lundi au mardi dernier les travaux de la 2è session ordinaire du Comité régional d’orientation, de coordination et de suivi des actions de développement (Crocsad) de la région au titre de l’année 2025..