Nouvelle loi sur l’organisation judiciaire : Les éclairages de l’universitaire Boubacar Bocoum

Dans cet entretien qu’il nous a accordé, l’enseignant-chercheur à la Faculté de droit privé de l’Université Kurukanfuga de Bamako revient sur la loi du 13 décembre 2024 portant organisation judiciaire au Mali. Dr Boubacar Bocoum évoque les innovations contenues dans ce texte

Publié mardi 25 février 2025 à 08:01
Nouvelle loi sur l’organisation judiciaire : Les éclairages de l’universitaire Boubacar Bocoum

De prime abord, l’enseignant-chercheur à la Faculté de droit privé de l’Université Kurukanfuga de Bamako indique que le processus de modernisation de la justice dans notre pays est en marche. D’après Dr Boubacar Bocoum, après l’adoption de plusieurs textes de loi, notamment la loi n° 2024-027 du 13 décembre 2024 portant Code pénal et la loi n°028 du 13 décembre 2024 portant Code de procédure pénale, le législateur a adopté, le 13 décembre dernier, une nouvelle loi portant organisation judiciaire. Ce texte abroge la loi n°2011-037 du 15 juillet 2011 portant organisation judiciaire au Mali, précise-t-il.

La nouvelle loi portant organisation judiciaire, appelée «loi Hamèye Founé Mahalmadane (puisque c’est lui qui a été son initiateur)», opère des changements significatifs au premier et second degrés, souligne l’universitaire. Il dira que le nouveau texte s’inscrit dans une volonté de simplification et d’adaptation des dispositifs juridiques aux besoins actuels et répond au souci d’endiguer une double crise qui sévissait dans la justice malienne. Il s’agit de la crise de l’autorité judiciaire et celle du service public de la justice, explique notre interlocuteur, ajoutant que le dispositif légal s’aligne également sur les attentes des citoyens, qui réclament une justice plus accessible, rapide et transparente.

Parlant des innovations contenues dans le texte, l’enseignant-chercheur indique que ses apports sont majeurs. Pour Dr Bocoum, l’évolution législative revisite le premier degré en créant des chambres criminelles au niveau des tribunaux d’instance. «La nouvelle loi consacre la création de chambres criminelles permanentes au sein des Tribunaux de grande instance (TGI) avec la suppression des Cours d’assises très lourdes, ne permettant de juger les accusés avec plus de célérité», explique-t-il. Cependant, signale l’enseignant-chercheur, avec la suppression des Cours d’assises, le danger est la garantie des droits de la défense avec la crainte des procès expéditifs. 

«À travers cette nouvelle loi, le législateur redéfinit les règles de gestion et de fonctionnement des juridictions. Le rôle des greffes auprès de chaque juridiction est précisé», soutient l’enseignant-chercheur. Il dira qu’il y a une optimisation des qualifications des greffiers. Ce qui permet de fluidifier les procédures judiciaires et de réduire les délais de traitement des affaires. «La réforme vise également à permettre une gestion unique des corps de greffiers, recrutés par des concours identiques, formés dans une même école et exerçant des métiers très proches», souligne l’enseignant-chercheur.

Pour notre interlocuteur, il fallait élargir la compétence de ces tribunaux pour qu’ils deviennent des juridictions des activités économiques. «Il faillait élargir leurs compétences aux agriculteurs, à l’agrobusiness, aux professions libérales et autres statuts», pense notre interlocuteur. 

Toutefois l’universitaire pense que le législateur a le mérite d’avoir introduit le double degré de juridiction, non seulement, en matière criminelle, mais aussi celle administrative. De même, l’introduction de la collégialité en matière pénale au niveau des juridictions de premier degré est à mettre à l’actif de la nouvelle loi, ajoute Dr Bocoum.

Avant de souligner également, l’apparition d’un nouveau magistrat dans le paysage judiciaire. «Au sein du tribunal judiciaire, un ou plusieurs juges exercent désormais les fonctions de juge de l’application des peines», explique-t-il. Une autre avancée majeure du texte a trait à la gratuité des procédures judiciaires qui est enfin mieux encadrée pour permettre à tous les citoyens, même les plus modestes, d’accéder à la justice, indique l’enseignant-chercheur.

 

JUSTICE RAPIDE ET ADAPTÉE- Dr Boubacar Bocoum ajoutera que le second degré a, lui aussi, fait l’objet de réaménagement par l’institution des cours criminelles d’appel. «Désormais, la Cour d’appel comprend au moins une chambre criminelle spécialisée compétente pour les infractions économiques et financières, de lutte contre le terrorisme et la cybercriminalité», signale-t-il, soulignant que les pôles économiques, de cybercriminalité, de lutte contre le terrorisme et la criminalité transnationale sont des 1ers degrés de juridiction pour ces infractions.

Le spécialiste dira que les tribunaux pour mineurs, les juridictions de l’application des peines et les tribunaux militaires seront chargés de traiter des affaires alambiquées nécessitant des approches spécifiques. «Plus qu’une simple réforme, il s’agit d’une véritable réorganisation judiciaire qui intervient dans une dynamique de modernisation de la justice, laissant présager une amélioration de l’administration de la justice et partant, la situation du justiciable malien», fait savoir Dr Bocoum.

Cependant, indique-t-il, des défis subsistent. «Si les réformes engagées dont cette loi et tous les processus engagés, tiennent leur promesse, alors les praticiens du droit devront repenser de fond en comble leurs exercices», estime l’universitaire. Pour lui, les innovations introduites, bien que prometteuses, nécessiteront des investissements conséquents. Pour Dr Bocoum, il est impératif de fournir à l’institution judiciaire, les moyens de rattraper son énorme retard technologique et de repenser de nouvelles organisations adaptées aux technologies nouvelles. 

Bembablin DOUMBIA

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