
Pr Abdoul Sogodogo : « Le Mali va devoir travailler à une diplomatie bilatérale orientée vers la sécurité et le développement»
En tant que Malien, il est toujours difficile de commenter en temps réel une décision aussi importante du Conseil de sécurité sur le processus de paix et de stabilisation du Mali. Les enjeux sont énormes sur le plan sécuritaire, économique et humain au Sahel et au Mali. Pour le Mali, à défaut d’obtenir un mandat robuste (engagement direct dans la lutte contre le terrorisme) de la Minusma, cette mission ne ramait plus dans le sens de la nouvelle marche énoncée par la Transition. Cette demande de retrait de la Minusma du Mali semble être soutenue par l’écrasante majorité de la population et une partie de l’élite politique.
Le retrait de la Minusma a certainement été planifié par les autorités maliennes. Dans l’immédiat, le retrait de la mission de maintien de la paix va entraîner des changements dans la dynamique de lutte contre le terrorisme et la gestion de
l’Accord pour la paix issu du processus d’Alger. En sortant d’un cadre multilatéral (Minusma) jugé peu efficace en matière de sécurisation des populations et leurs biens, le Mali va devoir travailler profondément à une diplomatie bilatérale orientée vers la sécurité et le développement
économique. Les pays du BRICS, (Brésil, Russie, Inde, Chine et Afrique du Sud) semblent être les partenaires stratégiques du Mali dans un contexte d’isolement voulu par le bloc occidental. Il s’agit pour le Mali de tirer le meilleur profit de cette proximité avec certains de ces pays.
La centralité de la diplomatie n’a jamais été aussi évidente pour le retour de la paix et la stabilité. Il s’agit de mobiliser les ressources importantes à ce niveau pour pacifier des relations compliquées, consolider les bons rapports de voisinage (Algérie, Burkina Faso, Guinée, etc.) et inspirer une refonte de la Cedeao pour en faire un véritable outil de sécurité collective, voire une institution de démocratisation et de développement. La grande inconnue de ce retrait brusque, c’est le comportement des acteurs armés sur le terrain. Comment les groupes armés terroristes et ceux éligibles au dialogue politique avec l’état malien vont ils se comporter sur le terrain ? Qui va occuper les emprises laissées par la Minusma notamment le deuxième camp militaire de Kidal après son départ ?
Sur le plan socio-économique, l’état doit anticiper pour résorber le chômage des quelques milliers d’employés de la Minusma qui seront sans emploi, ça peut être une bombe à retardement. Enfin, la question la plus importante que beaucoup d’observateurs se posent est de savoir si le départ de la Mission va engendrer la reprise des hostilités militaires sur le terrain.
De mon point de vue, je ne le pense pas. Hameli Bieleu dans « Politique de défense et sécurité nationale du Cameroun » nous enseigne qu’«il est nécessaire d’identifier les menaces et nommer le porteur de ces menaces, son agresseur potentiel ou réel, de lui adresser, de lui opposer, la riposte la plus ferme. Votre volonté de sauvegarder au prix du sacrifice suprême, l’objet de votre amour. Cet objet peut être matériel, votre territoire ou immatériel votre indépendance, votre souveraineté. Pour lever toute équivoque sur votre volonté de vous défendre, il est nécessaire de faire connaître à votre agresseur potentiel la nature des moyens qui lui seront opposés et lui faire voir ou envisager les dommages que vous lui infligerez, lesquels n’auront aucune commune mesure avec l’objet de sa convoitise. En un mot, il faut le dissuader de vous attaquer» (cité par Mohamed et Hamidou Doumbia dans leur ouvrage : “Les Maux et les Remèdes de l’Afrique”). La guerre tant attendue n’aura pas lieu, car chacun aura pris la mesure de la puissance de feu de l’une ou l’autre partie.
La mise en œuvre de l’Accord pour la paix et la réconciliation après la décision de retrait dépendra de plusieurs facteurs, tels que l’engagement des parties signataires (CMA, Plateforme et gouvernement malien) et le soutien de la communauté internationale (l’équipe de médiation dirigée par l’Algérie). De toute évidence, il est essentiel que les parties concernées continuent de travailler ensemble pour surmonter les défis et maintenir l’élan du processus de paix, même en l’absence de la Minusma. Dans la nouvelle résolution (2690) du 30 juin du Conseil de sécurité acceptée par le Mali, il est demandé au gouvernement du Mali de s’engager à élaborer un plan de transfert des tâches de la Minusma, compte tenu de la contribution éventuelle de l’équipe de pays des Nations unies, du Bureau des Nations unies pour l’Afrique de l’Ouest et le Sahel (UNOWAS) et d’autres parties prenantes, pour suivre l’Accord, et le présenter au Conseil de sécurité d’ici le 15 août 2023. Il s’agit donc de suivre quelle orientation le Mali va adopter dans cette perspective.
Toutefois, le dialogue, la coopération et l’engagement envers les objectifs de l’Accord (DDR, amélioration de la gouvernance, etc.) restent cruciaux pour parvenir à une paix durable.
Abdoulaye Amadou Sy : « Cet acte contribuera à renforcer la souveraineté et l’intégrité territoriale du Mali »
Bravo au gouvernement, parce que cette demande de retrait de la Minusma contribuera à renforcer la souveraineté et l’intégrité territoriale du Mali. Un pays souverain est celui qui peut se prendre en charge. On ne peut pas continuer à tendre la main jusqu’à défendre ses propres populations. Félicitations à l’Armée malienne, lorsque Barkhane est partie, il y a eu beaucoup de commentaires, comme quoi le Mali va s’effondrer. On s’est rendu compte que finalement les populations sont mieux sécurisées. Il y a encore le banditisme et des attentats résiduels un peu dans le Centre et dans le Nord, mais ce n’est plus le moment où on attaquait des camps, des villages entiers, et qu’on détruisait des récoltes.
Encore plus que jamais, c’est le moment pour tout le peuple malien de se lever comme un seul homme pour soutenir les autorités de Transition jusqu’à l’élection d’un nouveau président de la République qui trouvera que le terrain est
balisé. De 1962 à 2012, il n’y avait pas de soldats étrangers au Mali. Ce sont l’Armée malienne et les services de sécurité qui ont défendu l’intégrité
territoriale de notre pays. Donc, si on revient à cette époque, je pense que ce n’est que justice.
Même s’il n’y avait pas de terroristes, dans tous les pays du monde, l’action gouvernementale est toujours confrontée aux problèmes sécuritaires, politiques, socio-économiques…Mais, le Mali est en guerre. Depuis un demi siècle, c’est la première fois en 2012 qu’on a fait appel à des étrangers pour venir nous sécuriser.
La Minusma n’a pas pu jouer le rôle pour lequel nous avions demandé qu’elle vienne. C’était pour appuyer les efforts du gouvernement dans la sécurisation et le développement du pays. Mais aussi de renforcer son indépendance. Il faut saluer la Minusma pour les efforts déployés dans le domaine socio-culturel et économique, surtout dans le Nord et le Centre, mais ce n’était pas sa mission. C’est pour cela que plus elle reste ici, plus elle devient une mission humanitaire. Nous n’avons pas besoin d’avoir pratiquement 17.000 militaires, policiers et autres pour s’occuper des missions humanitaires et socio-économiques. Toutefois, leur départ va créer, au début, un vide qu’il faut immédiatement combler.
Sur les 17.000 membres de la Minusma, 13.000 sont des services de sécurité et des soldats. Mais les ¾ de ces soldats et policiers sont Maliens. Je pense que les reverser dans l’Armée malienne ainsi que les services de sécurité du Mali n’est pas une gageure. Il y a maintenant 4.000 autres personnes où les ¾ notamment des secrétaires, des administratifs, des chauffeurs et autres qui sont des Maliens. Je pense que le gouvernement, en prenant cette décision, l’a bien étudiée et je suis certain que des chantiers nouveaux vont être ouverts pour permettre de les résorber. Car, il ne faut pas que le départ de la Minusma soit ressenti comme créant une misère à une partie de nos populations.
Il y a également la question de la mise en œuvre de l’Accord pour la paix et la réconciliation. Nous avons été aux Assises nationales de la refondation (ANR) auxquelles nos frères du Nord ont participé entièrement. Là, ils n’ont pas tiré sur la ficelle. Le problème qui est posé au Mali, de l’indépendance à maintenant, c’est la centralisation intense des moyens de l’état et des décisions pour leur répartition. Vous irez dans chacune de nos régions, vous trouverez une poignée de personnes qui disent « Ah, si nous sommes indépendants, on peut faire ceci…’’ Mais, la quasi majorité des populations du Nord veulent rester avec le Mali. Mieux, l’Accord pour la paix, en son premier article dit que le pays est unitaire et défend l’indépendance, l’intégrité du territoire. Il y a quelques accrocs tels que l’article 6 du même texte qui dit que « les présidents des régions ainsi que les conseillers des régions sont élus au suffrage universel direct », ce qui est anormal. Et ça contredit l’article 1er. C’est ce qu’il faut corriger tout simplement.
Il faut apaiser les va-t-en guerre qui sont de part et d’autre. Et puis donner des assurances. Et l’état unitaire ne veut pas dire que ses ressources devraient être toujours gérées dans un centralisme comme dans les années 60. En 1960, le budget du Mali était de trois milliards de Fcfa. Maintenant, il est à près de 3.000 milliards. Il faudra bien que la décentralisation soit réelle et que les autorités au niveau des régions aient un vrai pouvoir sur la gestion des ressources que reçoivent ces localités. Les ressources qui sont octroyées par le gouvernement central pour la gestion du Nord devraient être affectées directement aux autorités sur place. On n’a pas besoin d’un arbitre pour cela.
Propos recueillis par
Massa SIDIBE
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