
Pour améliorer la santé des patients, chaque vendredi une «kotéba thérapie» est organisée au service de psychiatrie (archives)
Nous sommes au service de
psychiatrie du Centre hospitalo-universitaire (CHU) du Point G, un
établissement de troisième référence perché sur les hauteurs de Bamako. Une
fois dans l’enceinte de cet univers de soins, les premières sensations sont un
mélange de pitié et de mélancolie de voir des semblables souffrir
psychiquement. On s’interroge et les organes de la vue et de l’ouïe entrent en
fusion, mais c’est avec le cœur qu’on essaie de mieux comprendre. On se nourrit
d’une réflexion intérieure, parfois on bascule dans l’irrationnel parce que
personne n’est à l’abri d’un trouble mental.
Dans l’atmosphère feutrée
du service de psychiatrie, ce qui frappe l’esprit, c’est d’abord un espace
grillagé avec la présence de personnes déprimées, qui représentent probablement
une menace pour les autres du fait de leur agressivité. Sur une terrasse, à
quelques mètres, des box de consultations, d’autres malades et leurs parents à
leur chevet renvoient une image de la complexité de la prise en charge des
maladies mentales. Mais aussi de la nécessaire implication des familles pour
humaniser les soins. Surtout pour bannir dans les esprits les préjugés sur les
soins des troubles mentaux, le lugubre tableau d’antan avec des camisoles de
force. Les visages sont expressifs du chagrin et de la douleur des familles de
voir les siens touchés par une dépression.
Sur les mêmes lieux, des accompagnantes qui
font la cuisine en face des salles d’hospitalisation complètent le tableau. Au
milieu du site, une sorte de case abrite les discussions quotidiennes des
médecins avec les patients afin d’évaluer leur état. Les bureaux de médecins se
trouvent un peu excentrés à droite pour qui connait la topographie du service
de psychiatrie de l’hôpital. On assiste à un impressionnant ballet de
psychiatres et d’infirmiers autour des pensionnaires de cette unité de soins.
Ça va à 200 à l’heure dans un incessant va-et-vient des médecins.
Cette unité de soins psychiatriques travaille d’arrache-pied pour redonner le sourire aux personnes atteintes de dépression et autres maladies mentales. Pour beaucoup d’entre elles, c’est une lutte quotidienne pour s’extraire de l’étau de la dépression avec bien sûr, l’accompagnement de médecins et infirmiers, mais aussi de la famille. Pour certains malades, même les tâches simples peuvent devenir une montagne infranchissable.
Pour les personnes touchées
par la dépression, les troubles anxieux et autres formes de maladies mentales,
le regard de la société pèse souvent sur elles, même une fois guéries. C’est le
cas d’une jeune dame qui a accepté se confier sous anonymat. «J’ai fait deux
ans de dépression liée à des événements.
J’ai consulté dans plusieurs services
de santé mais le mal persistait. Grâce à un ami de la famille, j’ai été
finalement référée au service de psychiatrie du CHU du Point G pour une prise
en charge. Aujourd’hui, je me sens mieux. Ce qui m’insupporte actuellement,
c’est le regard stigmatisant des autres qui me traite souvent de folle ou
d’acculturée», explique-t-elle. Ce témoignage poignant renvoie à une triste
réalité dans notre pays où, on est encore loin de sortir de la violence psychologique
à l’égard des personnes atteintes de troubles mentaux.
Au rendez-vous
trimestriel de sa fille épileptique, au service de psychiatrie du Point G, une
mère raconte les difficultés de sa progéniture. «Ma fille suit un traitement
depuis neuf ans maintenant. Elle ne fait plus de crises d’épilepsie, mais elle
a du mal à suivre les cours à l’école. Elle se trompe souvent dans les comptes
du fait des séquelles de sa maladie», raconte-t-elle.
CONSOMMATION DE LA DROGUE-
Une autre maman accepte finalement de référer son fils au Point G pour une
prise en charge adéquate après moult et inutiles tentatives chez un
tradi-thérapeutique qui prétend avoir un pouvoir de guérison des pathologies
mentales. La bonne dame est loin d’être rassurée par les fugues à toutes
occasions, les délires et l’agressivité de son rejeton déficient mental. Grâce
à l’analyse médicale du service de la psychiatrie, des traces d’excitants ont
été découvertes dans son corps. «Je prie vraiment pour qu’il se rétablisse»,
affirme-t-elle, presqu’au bord des larmes. Et d’évoquer le coût des médicaments
qui reste aussi un casse-tête.
Le chef du service de
psychiatrie, Pr Souleymane Papa Coulibaly,
explique que son service traite les adultes, mais possède aussi une
ligne de service pédopsychiatrique, c’est à dire pour enfants. Le praticien
rappelle aussi que les activités de son service sont basées sur les
consultations et les hospitalisations, y compris des soins axés sur les
troubles psychotiques, les pathologies de l’humeur, les pathologies anxieuses,
et d’autres problèmes liés à la consommation de substances et des
psychothérapies. Et de souligner clairement que les nouvelles consultations en
2023 avoisinaient les 2.000. Par contre, les hospitalisations tournent entre
350 et 400 malades par an.
Avec moins d’une vingtaine
de psychiatres pour une population estimée à un peu plus de 23 millions
d'habitants, le Mali souffre d’une insuffisance de professionnels de santé
mentale, déclare le praticien du Point G, sans donner plus de précisions sur le
ratio de l’Organisation mondiale de la santé (OMS) en la matière.
Ce qui pousse l’État à
mettre en place des initiatives pour faciliter l’accès aux soins. «Nous
élaborons, avec le ministère de la Santé et du Développement social, le Plan
stratégique national de la santé mentale dont l’objectif est de mettre en place
un dispositif pour faciliter l’accès aux soins aussi dans les régions. Nous
avons ouvert des formations spécialisées en santé mentale afin de former des
spécialistes qui seront déployés dans les régions.
L’État a également fait de
son mieux pour inscrire les médicaments disponibles sur la liste de l’Assurance
maladie obligatoire (Amo). Mais d’autres efforts doivent suivre», reconnaît le
chef de service de la psychiatrie. Pour améliorer la santé des patients, chaque
vendredi une «kotéba thérapie» est organisée au service de psychiatrie. Le
Kotéba mêle danse, musique et théâtre. Depuis plus de 40 ans, une troupe
d’artistes a introduit cette forme de thérapie dans la prise en charge des
troubles mentaux au sein du service de psychiatrie.
La discrimination de la
société a un impact dévastateur non seulement sur les individus souffrant de
troubles mentaux, mais aussi sur leurs familles. «C’est justement la société
qui aggrave leurs maladies. C’est le cas de mon fils qui demeure toujours
lucide. On l’a juste amené ici pour une désintoxication. Mais, dans le
quartier, la rumeur circule sur son éventuelle aliénation du fait simplement
qu’il consulte dans un service de psychiatrie», déplore-t-elle.
De nombreux parents
découvrent après des délires la dépression de leurs enfants. «Je pense qu’il
consomme de la drogue, je lui ai conseillé d’arrêter en vain. Et voilà le
résultat», marmonne l’un d’eux. Une mère au chevet de son fiston souligne : «Il
fumait abondamment un truc dont j’ignore la nature. Un jour, je l’ai surpris en
train de monologuer, parfois en s’adressant au mur. C’est après que ses
troubles ont véritablement débuté», ajoute notre interlocutrice.
L’abus de substances
psychoactives est une réalité et prend des proportions inquiétantes au Mali.
Une étude réalisée en 2018 par le service de psychiatrie du CHU du Point G,
intitulée : «Évaluer l’impact sanitaire de la consommation des drogues chez les
patients pris en charge au service de psychiatrie du CHU du Point G.» en
atteste. Ses résultats ont montré que les jeunes de la tranche 20-30 ans
étaient les plus touchés. La même étude révèle que le cannabis est la drogue la
plus consommée, suivi de l’alcool et du chlorhydrate de tramadol. Mais aussi la
polytoxicomanie ainsi que de nouvelles formes de consommation. Et naturellement
qu’il y a des conséquences sur la santé et la vie sociale, notamment en termes
d’addiction et de troubles psychopathologiques.
La lutte contre les troubles mentaux est au cœur
des débats chaque 10 octobre, consacré Journée mondiale de la santé mentale,
afin d’assurer le plaidoyer. Les personnes atteintes de troubles mentaux et
leurs familles livrent quotidiennement une bataille contre la stigmatisation et
la discrimination. Les gens peuvent s’apitoyer sur leur sort,
mais ne sont pas prêts à faire l’effort de compréhension sur la nécessité de
leur accompagnement des malades dans la descente aux enfers.
Aminata DJIBO
Rédaction Lessor
Les agents qui ne se sont pas présentés lors des opérations d'identification biométrique ont un délai de grâce de trois mois, allant du 8 septembre au 8 décembre 2025 pour régulariser leur situation administrative.
De son vrai nom, Alpha Diallo, le rappeur Franco-guinéen, connu sous le nom d'artiste « Black M », en séjour en Côte d'Ivoire et se trouvant dans une situation de conduite imprudente, a été interpellé..
Nouvelle incroyable au Brésil concernant Neymar Jr. En effet, le footballeur a été désigné hériter d'un milliardaire en dollars autre que son père. Le testament a été rédigé à son nom..
Une habitante de la ville de Goundam a vu sa maison effondrer suite aux multiples érosions et intempéries survenues au cours de la saison d’hivernage..
Après avoir passé trois nuits dans le noir, certaines familles des logements sociaux de Kayes et ses alentours ont enfin poussé un ouf de soulagement suite au rétablissement de l’électricité dans leur secteur. Rappelons que certaines concessions de la cité ATT Bougou (logements sociaux) et .
La salle de conférence du gouvernorat de Mopti a abrité du lundi au mardi dernier les travaux de la 2è session ordinaire du Comité régional d’orientation, de coordination et de suivi des actions de développement (Crocsad) de la région au titre de l’année 2025..