
À la faveur de l’explosion démographique, le monde a basculé dans l’agriculture intensive avec l’emploi d’intrants chimiques pour une plus grande productivité. Cependant, l’agriculture bio est une alternative qui présente un avenir prometteur
Nourrir plus de 8 milliards d’individus sur la planète sans
produits chimiques est devenu une équation difficile à résoudre pour les
acteurs du secteur primaire. C’est pourquoi tous rivalisent d’ingéniosité pour
une production de masse. L’utilisation des engrais chimiques dans l’agriculture
remonte aux années 1970.
Ces produits artificiels dégradent les sols et
affectent la qualité des cultures. Soumise à des sécheresses récurrentes, la région
du Sahel à laquelle appartient le Mali, est aujourd’hui confrontée aux effets néfastes
du changement climatique, à l’érosion des sols et à la pollution. Dans un monde
où la santé des hommes est intimement liée à l’alimentation, il faudra bien
trouver une alternative. L’agriculture biologique devient de ce fait la niche
idéale.
Ce mode de production est respectueux de l’environnement. Il
emploie des engrais organiques qui permettent de préserver les sols en
conservant leur qualité. Le caractère naturel des produits est un gage d’une
alimentation saine, exempte de toute pollution chimique.
Selon des résultats d’études,
une alimentation «bio» entraîne une baisse significative du stress oxydant
(type d’agression des constituants de la cellule). Des travaux associent
l’alimentation «bio» à une réduction significative de ce phénomène impliqué
dans différentes pathologies chroniques. En particulier, certains types de
cancer, les maladies neuro-dégénératives (anomalie relative aux neurones), ou
encore le diabète.
Malgré ce potentiel éco-sanitaire évident, l’agriculture
conventionnelle reste reine et est soutenue par le gouvernement depuis les sécheresses
répétitives des années 1970. Le 14 décembre 2005, notre pays a adopté sa Loi
d’orientation agricole (LOA). Elle détermine et conduit la politique de développement
agricole du Mali à long terme.
L’objectif est de promouvoir une agriculture
familiale durable, moderne ainsi que l’entreprise agricole à travers la création
d’un environnement propice au développement d’un secteur agricole structuré.
Cette Loi concerne l’ensemble des activités économiques du secteur agricole et
péri agricole (transformation, transport, commerce, distribution et autres
services agricoles) ainsi que leurs fonctions sociales et environnementales.
Malgré cet objectif de développement durable affiché par la LOA, l’État
favorise la promotion de l’agriculture intensive en subventionnant les intrants
chimiques et en facilitant l’utilisation des pesticides.
Aujourd’hui, on assiste à la dégradation croissante de la
fertilité des sols et à la raréfaction des terres arables dans un contexte de
changement climatique qui impacte négativement le secteur. Face à cette
situation, des acteurs ont décidé d’inverser la tendance en investissant dans
une production agricole avec ou sans pesticides et engrais chimiques.
Des
fruits, légumes et plantes médicinales produits sans pesticides et en quantité,
c’est le pari réussi d’Oumar Diabaté, vétérinaire formé à Moscou (ex-URSS)
entre 1985 et 1992. Il est devenu un fermier réputé pour ses produits «bio»
qu’il tire d’un lopin de terre initialement peu propice aux cultures.
SEUL «MARAÎCHER BIO»- La «ferme agro écologique» de docteur
Diabaté est située à Satinébougou, village d’environ 400 habitants, à une
trentaine de kilomètres de Bamako. Mettre en valeur un sol qui était très
pauvre, où l’herbe ne poussait même pas, n’a pas été facile, ni à faire
comprendre aux agriculteurs dans la zone, affirme le fermier. «Quand j’ai
commencé ici, ils n’y croyaient même pas», se rappelle-t-il.
Démarré en 2005, son projet qui doit son existence à une
rencontre décisive avec l’écrivain, philosophe et paysan français Pierre Rabhi,
pionnier de l’agroécologie, Oumar Diabaté est le seul «maraîcher bio» qui
parvient à s’en sortir aujourd’hui. Son entreprise emploie cinq permanents. Sa
production n’a rien à envier à celle de structures de taille plus importante.
Il récolte chaque semaine l’équivalent d’une trentaine de paniers de légumes et
fruits.
En effet, plusieurs obstacles se dressent sur le chemin,
selon Oumar Diabaté. Parmi les défis majeurs de ce domaine, se trouvent les préjugés
que les gens ont vis-à-vis de cette pratique. Les gens étaient réfractaires à
son début en 2004. Ils disaient que c’était une technique qui ne peut pas
nourrir une population, explique le docteur vétérinaire. S’y ajoutent l’accès
au foncier, à l’eau et le problème de commercialisation.
Sur les pas du vétérinaire fermier, se trouve Mme Angelina Lê,
une ressortissante belge établie au Mali depuis plus d’une dizaine d’années. La
quarantaine révolue, cette anthropologue de formation qui a travaillé dans plusieurs
Ong internationales, a décidé de se lancer dans l’agroécologie en 2017.
Dans sa
ferme de 2 hectares, située à environ 7 kilomètres du village de Siby (Commune
rurale du Mandé) et à 45 kilomètres de la capitale, poussent des tomates,
courges, laitues, betteraves, roquettes (légumes), carottes, oignons et autres
cultures maraîchères. Un espace est réservé à de la volaille (poules pondeuses,
poulets et coqs de croisement, pintades, canards, dindons).
Du soja et d’autres
plantes nutritionnelles y poussent pour assurer leur alimentation. Pour lutter
contre les insectes, les mauvaises herbes ou parasites sans pesticides
chimiques incriminés dans la pollution du sol et des eaux souterraines, notre
fermière utilise des tagètes, plantes herbacées à senteur poivrée, comme le
millet d’Inde qui tue les vers nuisibles et écarte les insectes ravageurs.
Elle
utilise du compost et de l’engrais naturel obtenu à partir des déchets
organiques (épluchures, déchets de cuisine), mais aussi du fumier produit
par ses animaux. Malgré ces efforts consentis, Mme Lê peine encore à tirer
profit de son activité.
En 2019, Mme Lê a été victime de feux de brousse qui ont brûlé
la moitié de sa ferme de deux hectares. Elle évoque le vent qui véhicule des
maladies pour ses animaux. Il y a aussi les pluies qui provoquent le ruissèlement
et l’érosion des sols contre lequel elle a mis en place des cordons pierreux.
Pour faire face à cette zone granitique, «je me suis adaptée petit à petit à
mon environnement, en créant des zones pare-feu en anticipant les feux de
brousse et différents éléments», confie notre amazone.
L’agro écologie est la
voie la plus durable, selon elle. Un zoom sur les limites de l’agriculture
conventionnelle, son impact sur la santé humaine et les sols est nécessaire.
Notamment le changement climatique dû à la déforestation. Le «tout chimique»
n’est pas une solution pour nourrir une population, estime-t-elle.
DU PRODUCTEUR AU CONSOMMATEUR- «Aujourd’hui, dans tous types
d’agricultures, les intermédiaires constituent un problème. Car ils
prennent nos produits à un prix très bas et les revendent à un prix très élevé»,
fustige le fermier Oumar Diabaté. Le paysan sait produire mais ne sait pas
comment vendre, argumente-t-il. Pour parer à cette situation, le Réseau
solidaire en agroécologie paysanne citoyenne (Resapac), une association de
consommateurs bio au Mali, a lancé l’initiative du marché «bio».
Bâtie en architecture traditionnelle locale au cœur du
quartier de Magnambougou en Commune VI de Bamako, la Maison des arts «Kandioura»,
abrite des étals sur lesquels sont exposés divers produits agricoles. C’est le
marché «bio» de Bamako. Chaque samedi, fruits, légumes et autres produits maraîchers
issus de l’agriculture biologique y sont exposés.
Ces produits agricoles
attirent les visiteurs. Des producteurs et consommateurs bio s’y retrouvent
pour commercer. Les premiers écoulent leurs produits sur le modèle
des Associations pour le maintien d’une agriculture paysanne (Amap),
actuellement très prisées en France, sans intermédiaire entre fermiers et
consommateurs. Cependant, au Mali, la conversion à l’agro écologie peine à
prendre corps. Comment vulgariser cette pratique protectrice de
l’environnement, très importante dans l’agriculture ?
Hélène N’Diaye est paysagiste et membre de Resapac. Elle
propose un dialogue entre les gens du terrain et ceux qui sont au service de l’État.
Il s’agit pour elle de faire le point sur les réalités du terrain, partager
l’information et la formation. En ce qui concerne les procédés sur le terrain,
la productrice Mme Angelina Lê explique que le travail se fait sur l’interdépendance
entre l’élevage, l’agriculture, le maraîchage et les cultures céréalières. Le
sol est nourri par les fumiers organiques des animaux. Ceux-ci bénéficient à
leur tour des déchets du jardin. Des protéines obtenues à travers la plantation
d’arbres fertilisants comme le Moringa, les albizzias qui permettent de
fertiliser les sols pauvres.
Pour rester en bonne santé, Mariam Togola, consommatrice et transformatrice de produits bio, estime qu’il faut éviter les produits chimiques, car les agriculteurs utilisent des engrais non adaptés. Les engrais pour coton sont mis sur les produits maraîchers notamment les pesticides, les herbicides, selon Mme Togola. Pour reconnaître un produit bio et non bio, il faut le laisser à l’air libre pour en savoir, conseille Oumar Diabaté. Par exemple, une carotte bio laissée pendant une semaine à l’air libre, se dessèche mais ne s’avarie pas. En revanche, si le produit n’est pas bio, sa qualité se dégrade très rapidement, explique le producteur.
DES INITIATIVES SE DÉVELOPPENT- Dans ce contexte, le Resapac
apporte un appui technique aux producteurs qui respectent les grands principes
de l’agro écologie. Sa dynamique est basée sur un constat de traçabilité
effectué par un expert. Ils intègrent le réseau et signent une charte sur les
principes de solidarité. L’objectif est de créer un lien avec cette chaîne de
producteurs, consommateurs et transformateurs. Ensuite, de leur permettre de
vendre facilement sur notre «marché du samedi», conclut Hélène N’Diaye.
Malgré ces efforts, l’agriculture bio peine à prendre corps
au Mali. Pourtant, le gouvernement, les bailleurs de fonds et le secteur agro
industriel peuvent ensemble opérer cette révolution écologique pour parvenir à
une économie durable. Selon des statistiques, l’agro écologie pourrait éviter
11% de la perte du Produit intérieur brut (PIB).
À cet effet, dans le cadre de
la LOA, des activités sont-elles en cours pour la promotion de cette
agriculture écologique ? Est-elle aujourd’hui une priorité pour l’État ?
Qu’est-ce qui a été fait en la matière ? Pourquoi on a l’impression que rien ne
décolle ? Qu’est-ce qu’il faut faire ? Telles sont les questions que
nous avons posées aux techniciens de la direction nationale de l’agriculture
(DNA). Malgré nos multiples tentatives, les responsables de la DNA n’ont pas
souhaité répondre à ces questions.
Pendant ce temps, des pionniers sont à pied d’œuvre. Pour
partager son expérience de l’agroécologie, Oumar Diabaté a fait construire dans
sa ferme quelques cases et une salle de cours. C’est le Centre sahélien de
formation et de recherche en agro écologie (CSFRA) de Satinébougou. Il y
accueille depuis 2007 des stagiaires maliens et étrangers.
Si les enseignements
de Diabaté suscitent de l’intérêt, il n’est pas prophète dans son pays, la
production bio étant encore marginale au Mali. Pourtant, les autorités ont pour
ambition de faire du Mali «une puissance agro-pastorale» sous régionale, qui
pourrait assurer la sécurité alimentaire des populations, créer des emplois et
revenus dans une logique de développement durable et respectueux de
l’environnement.
Selon lui, notre pays a un climat qui nous permet de cultiver
pendant toute l’année. À cet effet, il appelle à la volonté politique pour
creuser des forages un peu partout pour assurer la maîtrise de l’eau, sur
laquelle repose toute activité agricole. Mais aussi, de protéger les
producteurs nationaux en règlementant le marché pour éviter d’importer les
produits que l’on peut trouver sur place, grâce à l’activité des braves paysans
maliens.
Kadiatou OUATTARA
Rédaction Lessor
Semoirs, charrues de labour, pièces de rechange des tracteurs sont fabriqués par nos artisans. La plupart de ces équipements sont vendus dans les zones de production comme Kita, Sikasso, Bougouni ou Koutiala. Certains fabricants arrivent aussi à écouler leurs produits dans des pays voisins.
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