
L’Essor : Les supporters rêvaient cette année de voir le Mali se qualifier pour la première fois de son histoire à la Coupe du monde, mais les Aigles ont raté le coche. Pour l’ancien international que vous êtes, qu’est-ce qui n’a pas marché ?
Cédric Kanté : Plusieurs choses n’ont pas marché. Déjà, il faut savoir que c’est une grosse désillusion, puisqu’on s’est fait éliminer par un adversaire qui était plus faible que nous, ça veut dire qu’il y a eu pas mal de manques. Je pense qu’il y a eu un problème de préparation, clairement au niveau matériel. Au centre d’entraînement, toutes les conditions n’étaient pas réunies pour disputer les deux matches peut-être les plus importants de l’histoire du football malien. Première chose. Ensuite, je pense qu’on a manqué un petit peu d’expérience.
Il y a beaucoup de jeunes joueurs qui ont joué les derniers matches au Maroc, mais là, c’était à Bamako, à 40° avec 60.000 personnes dans le stade. Je pense qu’on a cédé à la pression tout simplement. Et puis, je pense qu’offensivement, on a les mêmes problèmes depuis des années, c’est-à-dire face à des équipes plus faibles, on est capable de faire sauter le verrou, mais face à des équipes bien regroupées, on n’a pas eu les réponses.
Je pense qu’on a des joueurs offensifs qui sont en manque de rythme. On sait que ce sont des joueurs très talentueux, que ce soit Moussa Djénépo, Ibrahima Koné, ce sont des joueurs incroyables. Maintenant, ils sont un peu en manque de rythme, ils n’ont pas été forcément très performants, c’est aussi peut-être un manque de confiance, mais à l’avenir quand ces joueurs seront au top, je peux vous dire qu’on aura des résultats bien meilleurs.
L’Essor : L’élimination a coûté à Mohamed Magassouba son poste de sélectionneur national et le reste du staff technique a également été remercié par la Fédération malienne de football (Femafoot). Quels commentaires faites-vous de cette décision de la Femafoot ? Est-ce que vous vous y attendiez ?
Cédric Kanté : La décision pour moi, j’en ai parlé hier (lundi, ndlr) sur Canal+, était inévitable et j’ai envie de dire malheureusement. Dans le football de haut niveau, on veut des résultats, il n’y a pas eu de résultats malgré le travail très sérieux du staff, le progrès collectif de cette équipe, qui n’a perdu que très peu de matches ces dernières années. Les statistiques sont terribles, puisque l’équipe du Mali ne perd pratiquement jamais, mais ne gagne pas les matches qui comptent.
Le football de haut niveau est cruel et c’est encore plus cruel parce que j’ai passé du temps avec eux, j’ai vu le travail de grande qualité qui était effectué au quotidien. Mais encore une fois, on ne va pas refaire l’histoire du football, c’est la vie et c’est comme ça. Oui, je m’y attendais. Deux éliminations en huitièmes de finale de la CAN, une double confrontation où l’équipe a montré ses limites, qui ne sont pas toutes dû évidement au staff.
Elles sont plus dues à l’état de forme de certains joueurs et au manque d’éléments sur certains postes dans l’équipe nationale. Ce n’est pas le sélectionneur qui réalise le dernier geste, ça appartient aux joueurs et malheureusement là-dessus, ils auraient pu aider le staff en nous qualifiant mais ça ne s’est pas passé comme ça.
L’Essor : Plusieurs noms circulent déjà pour prendre la succession de Mohamed Magassouba, dont celui de votre ancien coéquipier de l’équipe nationale, Eric Sékou Chelle. Selon vous, quel profil doit avoir le futur sélectionneur des Aigles ?
Cédric Kanté : Il faut savoir qu’il y a beaucoup de soucis au Mali. Je pense que le profil du futur sélectionneur, ça doit être un jeune coach avec du potentiel, avec beaucoup d’envie puisqu’il ne va pas être dans les conditions matérielles, financières, etc. comme peuvent être les autres sélectionneurs des autres pays africains auxquels on se compare. Je ne parle même pas du Sénégal, du Maroc, de l’Algérie, je parle de la Guinée, du Burkina Faso.
Il faut donc un jeune coach très motivé, qui a évidement du potentiel et qui a une vraie vision technique sur la manière dont il va faire jouer l’équipe, parce qu’il y a quand même des joueurs de grande qualité au Mali.
Il faut qu’il soit à l’écoute, qu’il s’adapte. Il faut qu’il ait aussi beaucoup de caractère parce qu’il y a beaucoup de jeunes joueurs de même génération. Donc, il y a le bon côté et il y a aussi le côté un plus pervers, ce n’est pas la faute aux joueurs, c’est simplement quand vous êtes tous de même génération et que vous jouez ensemble depuis très longtemps, parfois c’est bien qu’il ait quelqu’un de l’extérieur qui fasse figure d’autorité. Le nouveau coach doit avoir tout ça.
L’Essor : À votre avis, qu’est-ce qui manque aujourd’hui à cette génération des Aigles dont le football séduit tant sur le continent, mais qui, à l’instar de ses devancières, n’est jamais parvenue à confirmer ?
Cédric Kanté : C’est peut-être un état d’esprit de tueur. Ça viendra peut-être du nouveau staff. On avait un premier staff qui était très joueur et qui a fait progresser les joueurs, c’était un vrai plaisir de les voir jouer avec une qualité de jeu. Maintenant, c’est peut-être 5% ou 10% qui manquait. C’est aussi ça le côté cruel du football, parfois vous pouvez mettre des choses en place pendant 4 ou 5 ans et puis, c’est validé par quelqu’un qui vient de l’extérieur qui rajoute une petite touche.
Ce qui manque aussi aux Aigles, c’est une prise de conscience, changer le logiciel, être moyen joueur, être peut-etre un peu plus tueur, ça peut être aussi une aide extérieure. Je parlais du staff mais si on structure mieux l’équipe nationale, tout ça va faire que les joueurs vont prendre conscience qu’il faut faire mal sur un terrain et que c’est au quotidien et par des petits détails qu’on va arriver à le faire.
L’Essor : Vous êtes consultant de la Chaîne cryptée Canal+ et vos analyses sont très appréciées des Maliens. Quelle est la nature du contrat qui vous lie à cette chaîne ?
Cédric Kanté : Je me rends compte que les émissions sont très suivies. Ça me met pas mal de pression à chaque fois qu’on passe, même si parfois ce n’est pas évident, notamment l’émission d’hier (lundi, ndlr), où il fallait peser un peu les réponses sans cacher les vérités. Je n’ai pas un contrat proprement parlé avec la chaîne, on parle de pige quand on est consultant extérieur, donc c’est simplement la pige, à la prestation, donc selon le nombre de date que je réalise, je fais des factures en fin de mois. Ça peut s’arrêter du jour au lendemain, tout simplement parce que je ne suis pas journaliste. C’est souvent le cas de consultant d’être payé à la pige.
L’Essor : Le tirage au sort de la Coupe du monde, Qatar 2022 s’est déroulé le vendredi 1er avril. Que pensez-vous des poules des cinq représentants africains, à savoir le Cameroun, le Sénégal, le Ghana, le Maroc et la Tunisie ?
Cédric Kanté : Je pense que le Sénégal a la poule la plus facile. Les Sénégalais font tout simplement figure de favoris dans leur poule. Ils ont montré qu’ils assumaient le rôle de favoris à la CAN, il faut qu’il y ait le même état d’esprit à la Coupe du monde. Le Cameroun avec la Serbie, la Suisse et le Bresil, pour moi c’est le groupe le plus difficile.
Samuel Eto’o (président de la Fédération camerounaise de football, ndlr) a parlé de changer l’état d’esprit, il faut jouer le rôle à fond, il va falloir voir la touche Rigobert Song (le nouveau sélectionneur des Lions indomptables, ndlr), c’est un peu trop tôt pour dire s’ils vont sortir de la poule mais c’est sûr qu’il va falloir être prêt et défensivement meilleur qu’ils l’ont été pendant une bonne partie de la dernière CAN.
Pour la Tunisie, pour moi c’est déjà fini malheureusement, je ne veux pas être médisant, mais jugé à travers ce qu’ils ont montré à la CAN et aux barrages de la Coupe du monde, ce sera très compliqué. Le Ghana a un coup à jouer parce que l’Uruguay et la Corée du Sud sont des équipes très expérimentées mais vieillissantes.
La Corée du Sud, c’est un autre football, ils ont l’habitude d’être là mais honnêtement, le Ghana avec la fraicheur et ce qu’ils ont montré face au Nigeria (barrages de la Coupe du monde, ndlr), je pense qu’ils sont capables de faire quelque chose au Qatar. Pour le Maroc aussi, la tâche s’annonce très compliquée. L’effectif marocain regorge de bons joueurs, mais le pays joue la Belgique et ce match, c’est un peu comme Algérie-France, avec beaucoup de binationaux. Ça peut être l’exploit comme l’a fait le Sénégal en 2002 contre la France, pourquoi pas ? Pour résumer, je pense que le Sénégal sortira des poules, pour les autres, ça dépendra un peu de leur préparation.
L’Essor : L’Afrique peut-elle vaincre le signe indien au Qatar et atteindre, pour la première fois de son histoire le dernier carré du Mondial ? Quels sont les atouts des cinq sélections africaines ?
Cédric Kanté : Je pense que le Sénégal a plus de chance pour atteindre le dernier carré, après ça depend aussi des tirages, des blessures, etc. Mais le Sénégal a tout, c’est la colonne vertébrale Mendy, Kalidou Coulibaly, Sadio Mané, Idrissa Guèye, je pense qu’avec ces éléments, les Lions de la Teranga peuvent aller loin parce qu’ils sont séreux. Le Cameroun, offensivement, a de joueurs incroyables. Ils ont l’expérience, de la vitesse et du talent. Le duo Samuel Eto’o-Rigobert Song, deux légendes du football africain, peut également aider le Cameroun.
Le Maroc, c’est des individualités, Vahid (le sélectionneur marocain, ndlr) a fait des choix forts. Les Marocains n’ont rien à perdre dans ce groupe avec la Belgique, avec une bonne préparation, ils peuvent tirer leur épingle du jeu. Ils ont été costauds dans les matches amicaux et ont fait une bonne campagne dans les éliminatoires de la CAN. C’est la même chose pour le Ghana. Outsider mais dans un coin de tête il faut que les Ghanéens aient l’envie de se qualifier. Les Tunisiens ont l’expérience, personne ne les attend, il faut qu’ils jouent leur va-tout.
L’Essor : À votre avis, quels sont les favoris de cette Coupe du monde et quelles sont les équipes susceptibles de créer la surprise ?
Cédric Kanté : J’ai presque envie de dire le Brésil parce que ce pays a des joueurs qui arrivent à maturité. On a Neymar qui recommence à être ce joueur incontournable. Je pense qu’il va arriver en plein boom à la Coupe du monde. Il va être bien épaulé avec des milieux de terrain très costauds. La France parce qu’elle a l’un des meilleurs attaquants du monde Benzema qui aura à ses côtés le meilleur joueur du monde Kylian M’Bappé. C’est très costaud.
Après, il y a d’autres sélections qui peuvent tirer leur épingle du jeu, notamment l’Espagne et l’Allemagne. L’Argentine, j’y crois moins mais voilà, j’aimerai bien qu’au fur et à mesure de la compétition, le Sénégal fasse figure de favoris. Le Canada a survolé les éliminatoires et peut également créer la surprise, et pourquoi pas la Serbie.
L’Essor : Vous êtes membre du comité directeur de la Ligue du Grand E+st de football (LGEF). Comment êtes-vous arrivé dans cet organe de la Fédération française de football (FFF) et quelles sont les missions de la LGEF ?
Cédric Kanté : C’est Albert Gemmrich, qui m’a nommé. C’est un ancien international françias qui a joué à Bordeaux qui est président de la Ligue d’Alsace maintenant. Moi en tant qu’ancien international originaire de Strasbourg, il a voulu que je sois la voix du football professionnel. On est là pour le football amateur et les petits clubs et ma mission c’est d’être ambassadeur des clubs professionnels qui sont au nombre de cinq dans cette Ligue du grand est, à savoir Metz, Nancy, Reims, Troyes et le Racing club de Strasbourg où j’ai joué.
C’est donc pour faire le lien entre le football amateur et les clubs pro qui sont parfois un peu en dehors du système, que nous sommes là. Les missions sont évidemment bénévoles et ne me prennent pas beaucoup de temps. C’est pour rendre un peut au football comme j’ai pu le faire pendant 10 jours avec l’équipe nationale que j’ai accepté de devenir membre de la Ligue du Grand Est du Football. Le football, c’est notre famille, on a toujours envie de participer d’une manière ou d’une autre.
L’Essor : Avez-vous un message pour le public sportif malien ?
Cédric Kanté : J’en ai plusieurs. Déjà, je voudrais remercier les supporters parce qu’ils ont été très nombreux au stade du 26 Mars pour soutenir la sélection nationale contre la Tunisie. Malheureusement, nous avons perdu. Il y a beaucoup de déception depuis quelques temps, mais ils doivent se rappeler que les éliminatoires des phases de poules de la CAN et de la Coupe du monde se sont bien passées. Il y a une dynamique de victoires, donc de l’espoir. Concernant le staff technique, je pense que le public a été trop dur avec le staff.
J’ai vu comment il travaillait et avec quel sérieux et quelle détermination. Ils avaient leur vision, elle n’a pas été couronnée de succès mais il ne faut pas jeter le bébé avec l’eau du bain. J’ai travaillé au quotidien avec eux et je suis déçu qu’ils partent comme ça. Je pense que le staff technique n’a pas été forcement aidé par les circonstances.
Ils ont pris l’équipe quand il n’y avait pas de fédération, ils ont fait du mieux qu’ils pouvaient et les conditions matérielles étaient compliquées, ça le public ne le sait pas mais ils ont dû se battre, ils ont fait plus qu’être des coaches et des sélectionneurs.
Ils ont porté cette équipe à bout de bras, ils ne sont pas récompensés, alors le public ne doit pas être trop dur avec eux. J’espère que les supporters ne feront pas la même chose avec le prochain staff.
Comme conseil, je demanderai au prochain staff de mieux communiquer sur la manière dont il travaille. En tout cas, il faut que le public sache que nous les anciens joueurs, serons toujours prêts à apporter notre petite pierre à la construction de l’édifice national, c’est-à-dire la sélection nationale.
Interview réalisée par
Boubacar KANTÉ
Boubacar KANTE
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