Perspectives sahéliennes : Le défi du contrôle sur les ressources et sur les données

La fin du mois de novembre a été intense, riche en actualités et en enseignements sur la vie économique du Mali. D’abord avec le communiqué de la mission du Fonds monétaire international (FMI), ensuite avec l’accord, conclu entre le Gouvernement et la société Barrick Gold. Deux événements distincts, mais qui semblent se rejoindre par le prisme des données.

Publié mardi 02 décembre 2025 à 09:54
Perspectives sahéliennes : Le défi du contrôle sur les ressources et sur les données

Une équipe du FMI a achevé une mission virtuelle au Mali, du 10 au 21 novembre 2025, afin d’évaluer les progrès accomplis dans le cadre du programme de référence approuvé en mars 2025. Ce programme, faut-il le rappeler, vise à assurer la viabilité des finances publiques, à renforcer la gouvernance et à améliorer la gestion budgétaire, selon l’Institution.


Comme à l’accoutumée, une telle mission se conclut par une revue de certaines données macroéconomies. Ainsi, le FMI a annoncé une baisse des prévisions de croissance pour 2025 : de 5 % à 4,1%. L’Institution explique cette réduction par les défis majeurs auxquels le Mali est confronté cette année : «récentes perturbations dans l’approvisionnement en carburant, baisse de la production d’or, coupures d’électricité récurrentes et réduction de l’aide au développement et humanitaire». Le ralentissement de la croissance s’accompagne toutefois d’une inflation contenue, inférieure à 3 %.


Pour 2026, les prévisions du FMI sont plus optimistes : une croissance du PIB de 5,5 % et une inflation limitée à 2,5%, grâce à la reprise de la production aurifère et à une amélioration progressive de la situation sécuritaire.


Le Gouvernement du Mali, de son côté, a publié un mémorandum présentant une lecture légèrement différente de celle du partenaire de Brettons Woods. Selon les autorités, la croissance devrait atteindre 6,1% en 2025, avec une inflation contenue à 2,5%. En 2026, elles anticipent une croissance de 6,3 % et une inflation autour de 2%, en s’appuyant sur les statistiques des services techniques.


Cette divergence illustre la volonté du gouvernement d’être maître de son destin statistique, en affirmant sa souveraineté sur les données macroéconomiques. Si le FMI a mis en avant la baisse de la production aurifère, il a sans doute sous-estimé la force de négociation du Gouvernement, qui a su imposer ses conditions à la principale société productrice d’or du pays. Quatre jours seulement après la fin de la revue virtuelle du FMI, le Gouvernement et Barrick Gold annonçaient un accord mettant fin à plusieurs mois de bras de fer.


Le Mali, déterminé à contrôler la production du métal précieux qui le place parmi les grands producteurs africains et mondiaux, a obtenu que l’entreprise s’aligne sur le nouveau code minier et son contenu local. Cela signifie que les chiffres de la production d’or pour 2025 et 2026 devront être réévalués, au regard des concessions faites par la société canadienne.


Le ministre de l’Économie et des Finances, Alousséni Sanou, aux côtés de son collègue des Mines et du représentant de Barrick Gold, a détaillé les retombées attendues : «Nous espérons obtenir 70 milliards Fcfa de TAF (taxes sur les activités financières), 20 milliards Fcfa d’impôt spécial sur certains produits, 80 milliards Fcfa de dividendes, 20 milliards Fcfa de contributions au fonds minier, ainsi que 25 milliards Fcfa grâce à la levée de l’exonération sur les produits importés par la mine.» Le site d’information sénégalais Seneweb n’a pas hésité à parler de «la mirobolante somme que Barrick Gold va verser à Bamako».


Il faut rappeler que cette entente est le fruit de concessions mutuelles, permettant de rétablir un partenariat profitable aux deux parties. Durant la crise, la mine avait même été placée sous administration provisoire par la justice.


Cerise de décembre sur ces gâteaux de novembre, le Président de la Transition, le Général d’armée Assimi Goïta, a reçu hier au Palais de Koulouba, des mains du ministre de l’Économie et des Finances, Alousséni Sanou, le rapport de fin de mission de la Commission de négociation et de renégociation sur les sociétés minières au Mali. La principale donnée qui en ressort, est qu’avec le travail acharné de la Commission de négociation et de renégociation, la part de l’État malien passe de 201 à 358 milliards de Fcfa en termes de redevances annuelles. 


Au Sahel, la souveraineté ne se décrète pas : elle se négocie, gramme d’or après ligne de statistique. La bataille engagée au Mali et dans les États de la Confédération du Sahel exige à la fois la maîtrise des données face aux institutions internationales et le contrôle des ressources à travers le respect de la nouvelle législation minière.


Cette bataille pour la souveraineté se joue à la fois dans les mines et dans les chiffres. C’est là que se mesure la dignité des États.

Alassane Souleymane

Lire aussi : Construction citoyenne : La DGCC renforce les capacités sur la citoyenneté

Dans le cadre du renforcement des capacités de son personnel, la Direction générale de la construction citoyenne (DGCC) a organisé, jeudi dernier dans ses locaux, une session de formation à l’intention de ses agents..

Lire aussi : Redevances annuelles des sociétés minières : La part de l’État malien passe de 201 à 358 milliards de Fcfa

Cette prouesse financière est le résultat du travail acharné mené par la Commission de négociation et de renégociation mise en place par les autorités. Celle-ci a présenté hier son rapport de fin de mission au Président de la Transition, le Général d’armée Assimi Goïta.

Lire aussi : Sécurité de l’eau au Mali : La phase opérationnelle du pasema démarre en 2026

La salle de réunion de la Société malienne de patrimoine de l’eau de potable (Somapep-Sa) a servi de cadre, vendredi dernier, à la 1ère session du comité de pilotage du Projet d’appui à la sécurité de l’eau au Mali (PASEMa)..

Lire aussi : Disponibilité des hydrocarbures à Bamako : L’embellie se poursuit

Ah oui ! Tout indique, ce matin du mercredi 26 novembre 2025, que la situation s’est améliorée concernant l’approvisionnement en carburant dans la ville de Bamako. La circulation reprend son rythme habituel. Les embouteillages aussi..

Lire aussi : Marchandises maliennes bloquées à Dakar : Trois mois de répit accordés aux opérateurs

Le président du Conseil malien des chargeurs (CMC), Kissima dit Bakissima Sylla, a annoncé ce mercredi 26 novembre que des dérogations exceptionnelles ont été accordées aux marchandises maliennes bloquées au port de Dakar..

Lire aussi : Hamadou Fall Dianka, DG des Impôts : «Le montant des recettes électroniques a atteint 300 milliards de Fcfa en 2024»

Dans cet entretien exclusif, le directeur général des Impôts évoque, entre autres, les étapes franchies en termes de transformation numérique de ses services, les avantages concrets pour les citoyens et les entreprises, les défis rencontrés et les innovations à venir pour consolider cette d.

Les articles de l'auteur

Perspectives sahéliennes : La balkanisation du sahel n’aura pas lieu

Le Président de la République du Niger, Abdourahmane Tiani, lors d’une importante tournée de 13 jours dans les régions de Dosso, Tahoua, Agadez, Zinder, Maradi et Diffa, a révélé les projets nébuleux des groupes terroristes et de leurs sponsors étatiques pour le Sahel..

Par Alassane Souleymane


Publié mardi 25 novembre 2025 à 08:23

Forum mondial des médias du Sud à Johannesburg : La Chine et l’Afrique pour une diplomatie culturelle efficace

L’agence de presse officielle chinoise Xinhua s’est associée à l’Union africaine pour un dialogue du Sud global autour de la communauté des médias des deux parties. Deux jours de débats et d’interventions ont mis en lumière les priorités des partenaires : entretenir un partenariat fécond dans un monde en mouvement, entre multilatéralisme fragile et multipolarisme en construction..

Par Alassane Souleymane


Publié mercredi 19 novembre 2025 à 07:48

À l’heure du Mali : Ce 14 novembre, le Mali et Kidal tiennent bon

-.

Par Alassane Souleymane


Publié vendredi 14 novembre 2025 à 10:49

À l’heure du Mali : Face à la crise, un leadership gouvernemental avéré

Ce matin, le Président de la Transition préside la cérémonie de lancement d’un vaste programme de construction d’infrastructures hospitalières d’urgence à Korofina, dans le District de Bamako, au bénéfice de la capitale et de plusieurs régions. Cela se passe bien au Mali, ce beau et grand pays que certains rêvent de voir livré aux hordes avides de sang humain et à leurs maîtres étatiques..

Par Alassane Souleymane


Publié lundi 10 novembre 2025 à 08:02

À l’heure du Mali : L’esprit Assimi ou la souveraineté chevillée au corps du malien

Ces dernières semaines ont été marquantes pour les Bamakois et nombre de nos compatriotes en région, confrontés à une pénurie de carburant qui a fortement impacté la vie socioéconomique en général, et leur quotidien en particulier. Des images saisissantes ont frappé les esprits par leur contraste. Et ce contraste dit, en profondeur, l’état d’esprit qui prévaut chez nos concitoyens et nos dirigeants..

Par Alassane Souleymane


Publié lundi 03 novembre 2025 à 10:41

À l’heure du Mali : La dignité à la puissance malienne

Depuis plusieurs semaines, notre pays vit une pénurie de carburant sans précédent. À Bamako comme dans plusieurs régions, les files d’attente s’allongent, les moteurs se taisent, et nos compatriotes subissent la crise..

Par Alassane Souleymane


Publié lundi 27 octobre 2025 à 09:14

Crise du carburant au Mali : Quand le temps confirme les prémonitions du président Assimi Goïta à Moscou

Dans le cadre de sa visite officielle en Fédération de Russie, le Président de la Transition, le Général d’armée Assimi Goïta, a rencontré le mardi 24 juin 2025, à Moscou, les membres de la communauté malienne résidant en Russie..

Par Alassane Souleymane


Publié jeudi 16 octobre 2025 à 13:54

L’espace des contributions est réservé aux abonnés.
Abonnez-vous pour accéder à cet espace d’échange et contribuer à la discussion.
S’abonner