Supplément culture, Tagout : La musique des possédés

Cet air musical, chaque fois qu’il est entonné, renvoie à un djinn. Il garde toujours sa sacralité chez certaines communautés dans le Septentrion malien

Publié vendredi 25 novembre 2022 à 07:26
Supplément culture, Tagout : La musique des possédés

Le «Tagout», une sonorité rare et presque méconnue du grand public. Étymologiquement Tagout désigne le «griot» en tamashek. C’est aussi le nom donné à cette musique traditionnelle et de la communauté de tamasheks noirs dans la zone  du Gourma et dans la Région d’Ansongo. Cette musique est jouée et chantée à l’occasion des cérémonies des possédés.


Pour tout bon berger, la musique est un compagnon qui soulage de la solitude. L’histoire du Tagout est celle d’un berger qui avait disparu dans la brousse. Il y séjourna plusieurs années avec les génies ou «djhinns» avant de retourner au village avec un ngoni monocorde. Ce fut la naissance de Tagout. Après la réapparition  du berger, la musique Tagout a été vulgarisée par la communauté et on y fait appel lors des événements des possédés. Le ngoni accompagne des chants qui incitent les  possédés lors des cérémonies de «holley» (un rituel d’invocation des djinns).

Selon Assani Ag Okeytan, chaque rythme de Tagout fait allusion à un diable qui correspond à un esprit des possédés. Ainsi, les grands maîtres des possédés se sont intéressés à ce genre musical lors des cérémonies de holley. Le ngoni, cet instrument traditionnel était réservé aux hommes de caste. Avec l’évolution du temps, il est permis aujourd’hui à tous ausein de la communauté  tamasheks noire de l’utiliser.  «J’avais pris l’habitude de jouer le ngoni dernière les animaux dans les pâturages.

Comme mon père était un grand maitre des possédés et guérisseur traditionnel, il invitait les joueurs de Tagout lors de ses cérémonies», relate le berger Assani Ag Okeytan. Il explique avoir été contraint un jour d’expliquer à son père qu’il savait jouer le ngoni donc qu’il maîtrisait cet instrument à cordes.

 Son papa accepte de sacrifier un peu temps à le regarder jouer pour se faire une idée de son savoir-faire. Il finit par être convaincu au bout de quelques notes et inviter son fils dans les rituels d’invocations des êtres invisibles. Il reçoit même de son père en 2006, un ngoni à 3 cordes en guise de cadeau. Depuis ce jour, celui qui vit de son art arbore fièrement partout son ngoni.

De nos jours, le Tagout est un appel aux djinns lors des rituels d’invocations de ces êtres surnaturels par les des possédés. Sa particularité est que chaque morceau  de Tagout représente un nom de djinn et une communauté des possédés, indique Assani Ag Okeytan. 


 Accompagné de son instrument, une forme de guitare traditionnelle à 3 cordes et de son danseur, Alassane Ibrahim Cissé, et notre confrère et ancien collaborateur au Quotidien national Gamer A. Dicko, l’artiste nous a rendu visite à la rédaction où on a pu échanger avec lui sur le Tagout et ses implications culturelles dans le Septentrion malien.

Selon les explications de notre homme, cette musique est devenue populaire de nos jours.  De plus en plus de nombreuses personnes s’y intéressent et on en demande dans les cérémonies sociales. Cette musique garde toujours sa sacralité chez certaines communautés et certains morceaux entonnés ou rythmes font dresser les cheveux sur la tête et procurent des sensations  étranges à l’auditoire ou attirent des malheurs à un instrumentiste non initié.


Il se dédié à la promotion et la pérennisation du Tagout en le rendant plus digeste lors des événements sociaux. «Aucun membre de ma famille n’a joué le Tagout, je suis le seul à le faire malgré mon statut de noble», a-t-il laissé entendre, avant de développer la passion qui l’anime pour ce genre de musique en tant que berger.  Ainsi, il cherche à faire carrière dans le monde de la musique et participe à des festivals et autres rendez-vous culturels.

Il a joué au Festival sur le Niger et programme d’exprimer son talent dans d’autres festivals à travers le continent africain. Aujourd’hui, l’ambition qu’il affiche fièrement est d’inscrire cette musique dans le répertoire national voire international.

Amadou SOW

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