Vendredi dernier, les membres du Conseil de sécurité des Nations unies, en sa 9365è séance, ont adopté à l’unanimité, le projet de résolution qui met fin à la Mission multidimensionnelle intégrée des Nations unies pour la stabilisation au Mali (Minusma). Cette résolution est une réponse à la requête formulée par le gouvernement pour un « retrait sans délai » de la Mission du territoire national. Ce retrait se fera sur six mois du 1er juillet au 31 décembre. Déployée au Mali depuis le 1er juillet 2013, la Minusma aura passé plus de 10 ans sur le territoire national.
En 2013, sa création a été justifiée par l’appui aux autorités maliennes pour stabiliser les régions du Nord, écarter les menaces et prendre activement des dispositions afin d’empêcher le retour d’éléments armés dans ces zones, particulièrement à travers le rétablissement de l’autorité de l’état dans tout le pays. Après plusieurs années de déploiement des forces de la Minusma sur le terrain, la situation sécuritaire, qui concernait le Nord du pays, s’est progressivement dégradée et s’est propagée dans les autres régions notamment celles du Centre. C’est pourquoi, depuis plusieurs années, les autorités maliennes demandaient un mandat plus robuste pour la Mission pour mieux faire face à la situation. Mais rien n’y fait. Chaque année, le mandat était renouvelé sans tenir compte de cette requête du Mali.
Depuis le début de la Transition en août 2020, un enchainement d’évènements est à l’origine de la demande de retrait de la Mission. D’abord, la brouille diplomatique entre le Mali et la France qui a conduit au départ de la Force Barkhane. Ensuite, la question du contrôle des rotations des contingents et de l’espace aérien national perçue par la Mission comme des restrictions et des entraves à la mise en œuvre de son mandat. Vient s’ajouter à cela, celle des droits de l’Homme. Dans ses rapports trimestriels sur la situation au Mali, le secrétaire général des Nations unies pointait chaque fois un doigt accusateur sur les Forces armées maliennes auxquelles, il attribue des violations des droits humains au cours des opérations. Des accusations que les autorités maliennes ont toujours réfutées, dénonçant une instrumentalisation de la question des droits de l’Homme.
Cette situation a d’ailleurs conduit à l’expulsion en février dernier, de Guillaume Ngefa-Atondoko Andali, directeur de la division des droits de l’Homme de la Minusma suite à ses « agissements déstabilisateurs et subversifs, en violation flagrante des principes et obligations que doivent observer les fonctionnaires des Nations unies et tout diplomate accrédité au Mali ». La situation s’est envenimée avec la publication du rapport du Haut-commissariat des Nations unies aux droits de l’Homme sur les évènements de Moura. Le gouvernement a rejeté vigoureusement « les conclusions hâtives de ce rapport biaisé ». Avant de dénoncer à travers ce document « orienté », une volonté réelle de certains états, d’instrumentaliser notre organisation commune pour nuire, voire punir le Mali pour ses choix souverains.
OBJECTIF NON ATTEINT- Après 10 ans de présence, le gouvernement a estimé que la Minusma n’a pas atteint son objectif fondamental. C’est pourquoi, le Mali a toujours demandé d’adapter la Mission à la situation du terrain. En réponse à cette requête maintes fois formulée, les options proposées par le secrétaire général dans son rapport sur l’examen interne de la Minusma ne prenaient pas en compte les préoccupations et les attentes exprimées par le gouvernement et les populations du Mali. Pire, selon le gouvernement, la Mission était devenue une partie du problème en alimentant les tensions intercommunautaires exacerbées par des allégations d’une extrême gravité et qui sont fortement préjudiciables à la paix, à la réconciliation et à la cohésion nationale. Cette situation a engendré un sentiment de méfiance des populations maliennes à l’égard de la Mission et une crise de confiance avec les autorités.
C’est pourquoi, le Mali a demandé le retrait sans délai de la Mission. Ce qui a été accepté par les membres du Conseil de sécurité le vendredi 30 juin dernier par le vote à l’unanimité de la résolution 2690 proposée à cet effet par la France et qui met fin à la Mission. Au cours de leurs interventions après le vote, les représentants des pays ayant demandé la parole notamment le Ghana, le Brésil, l’équateur, les états-Unis, la Chine, la Russie, l’Albanie, les émirats arabes unis, le Royaume-Uni ont demandé aux autorités maliennes, un retrait coordonné et ordonné. Mais aussi de garantir la sécurité et la libre circulation du personnel de la Minusma, le transfert des tâches couvertes par la Mission dans le cadre de la mise en œuvre de l’Accord pour la paix, etc. En réponse, l’ambassadeur représentant permanent de notre pays auprès des Nations unies a indiqué que le gouvernement prend acte de la résolution 2690 ainsi adoptée qui met fin au mandat de la Mission à compter du 30 juin.
Issa Konfourou a promis qu’en tant que gouvernement responsable, les autorités maliennes s’engagent à coopérer étroitement avec le secrétariat général des Nations unies et la Minusma dans le cadre de la mise en œuvre diligente de cette résolution dans les délais impartis. Dans cette dynamique, il assure que le Mali, conformément à sa responsabilité de pays hôte, poursuivra les mesures prises en vue d’assurer la sureté et la sécurité du personnel, des locaux, des installations et des biens de la Mission jusqu’au départ à date convenue. RETRAIT ORDONNé- Dans cette résolution adoptée à l’unanimité, le Conseil de sécurité demande à la Minusma de commencer immédiatement le 1er juillet, la cessation de ses opérations, le transfert de ses tâches ainsi que le retrait ordonné et sûr de son personnel, avec l’objectif d’achever ce processus d’ici le 31 décembre.
Cela, en étroite concertation avec le gouvernement et en coordination avec la troupe et les pays fournisseurs de police. Il demande au secrétaire général de s’engager avec le gouvernement à élaborer un plan de transfert des tâches de la Minusma dans le cadre de l’Accord et le présenter au Conseil d’ici le 15 août prochain. La résolution dit également que jusqu’au 31 décembre, la Minusma est autorisée à remplir certaines fonctions, entre autres, assurer la sécurité du personnel, des installations, des convois et du matériel des Nations unies et du personnel associé, maintenir une connaissance de la situation à proximité des sites de la Mission, assurer l’escorte du personnel civil et en uniforme, exécuter des opérations en vue d’extraire le personnel des Nations unies et les travailleurs humanitaires en danger, fournir un appui médical y compris aux blessés et l’évacuation sanitaire du personnel des Nations unies.
Aujourd’hui, certaines questions taraudent les esprits notamment les perspectives sur le plan sécuritaire après le retrait de la Minusma des zones qu’elle occupe. D’aucuns se demandent comment seront comblées ses actions sur le plan social, humanitaire, sur le plan de l’emploi car des milliers de jeunes Maliens travaillent pour la Mission. Même s’il a soutenu devant le Conseil de sécurité que la Minusma n’a pas atteint son objectif fondamental d’appui aux efforts du gouvernement pour la sécurisation du pays, l’ambassadeur Issa Konfourou a toutefois reconnu que le peuple et le gouvernement saluent la contribution de la Mission dans d’autres domaines, notamment en matière d’assistance humanitaire, sociale et les missions de bons offices du représentant spécial du secrétaire général.
Le gouvernement a aussi rassuré l’opinion nationale que des mesures sont prises pour atténuer l’impact de cette décision. Vendredi soir à la télévision nationale, le chef de la diplomatie a assuré que la demande de retrait de la Minusma n’était pas une décision hâtive. « On ne sait pas lever un matin pour demander le retrait de la Minisma », a souligné Abdoulaye Diop, ajoutant qu’une stratégie a été mûrement réfléchie pour atténuer les impacts de ce retrait aussi sur le plan de la sécurité que dans le domaine de l’emploi et des actions sociales.
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